L’approche intersectionnelle auprès des victimes d’agression à caractère sexuel

Depuis plusieurs années, bon nombre de théoriciennes, théoriciens, d’intervenantes et d’intervenants se questionnent sur les meilleures pratiques à adopter en matière d’intervention pour favoriser la prise en compte des réalités particulières des personnes qui vivent de multiples discriminations sociales. L’intersectionnalité, qui a vu le jour dans les années 1990 grâce à la juriste Kimberlé Crenshaw, « désigne non pas un point d’ancrage fixe où les oppressions vécues s’accumulent et s’enchaînent mais plutôt une position sociale en mouvance où les effets interactifs des systèmes discriminants modèlent la personnalité d’un individu unique et complexe. »

Dans cette perspective, l’approche intersectionnelle permet de prendre en compte les  « effets simultanés des systèmes de discrimination ».  Ainsi, le vécu d’une femme noire et d’une femme blanche, toutes deux victimes d’agression à caractère sexuel, différera de par leur position sociale, culturelle, identitaire et les privilèges qui en découlent.

L’approche intersectionnelle « explore les sentiments de colère et de désarroi » liés au statut des personnes et met en évidence la capacité de chaque individu à trouver des solutions aux problèmes vécus. Marchand ajoute qu’elle « déconstruit aussi la polarité des images stéréotypées des femmes d’ici et d’ailleurs et fait appel à l’ouverture d’esprit des intervenantes face à la diversité des vécus de femmes ».

L’intervenante ou l’intervenant qui utilise l’approche intersectionnelle voudra donc examiner les composantes de l’identité de la personne aidée (sexe, genre, culture, capacités physiques et intellectuelles, orientation sexuelle…) et les effets sur son statut social . Il lui faudra aussi réfléchir aux privilèges de sa position socioculturelle face à la personne aidée, pour mieux s’attaquer aux obstacles et aux discriminations rencontrées par celle-ci. Ainsi, l’intervenante ou l’intervenant voudra mettre en place des moyens inclusifs d’aborder les problèmes sociaux et les solutions pour favoriser une reconnaissance des difficultés spécifiques auxquelles font face certaines personnes de par l’imbrication de leurs spécificités identitaires et des discriminations qui en découlent.

Source

Corbeil, Christine, Marchand, Isabelle, L’approche intersectionnelle : origines, fondements théoriques et apport à l’intervention féministe. Défis et enjeux pour l’intervention auprès des femmes marginalisées, 2006.